Notre salon Arletty: dès le début des années 1930, Arletty est devenue une figure érotique, ce dont témoigne ce portrait de Moïse Kisling, datant de 1933. Crédits : © Moïse Kisling / ADAGP, Paris 2012 / Photo © Studio Monique Bernaz, Genève.

lundi 16 juin 2014

Robert Ganzo (1898-1995)

"Robert Ganzo est né à Caracas, poète d’origine vénézuélienne d’expression française. Adolescence à Bruxelles, puis installation à Paris comme bouquiniste, et libraire. Engagé dans les combats de la Résistance, fait prisonnier, il s’évade. Poète, il publie successivement Orénoque (1937), Lespugue (1940), Rivière (1941), Domaine (1942), Langage (1947), Colère (1951), Résurgences (1954), recueils réunis dans L’Œuvre poétique éditée chez Gallimard en 1997. La poésie de Robert Ganzo, limpide, superbe, d’une grande pureté formelle, a des allures de viatique tant elle se révèle intense et douce, à la fois luxuriante et cristalline. Elle est tout entière d’évidence, d’envoûtement, sans le moindre hermétisme, vouée à la célébration de la présence humaine, de l’amour et du monde".


Poète, homme de théâtre, peintre et archéologue Robert Ganzo avait entretenu un long commerce avec l’art pariétal, les armes de ce temps, les rêves de ces premiers hommes, jusqu’à en être l’intime. Son poème puise sa tension dans cette très ancienne imprégnation autant que dans la présence à ses côtés de sa compagne et dédicataire en ces premiers mois de 1940» :

“(…) Le Jour. Regarde. Une colline
répand jusqu’à nous des oiseaux,
des arbres en fleurs et des eaux
dans l’herbe verte qui s’incline.
Toi, femme enfin -chair embrasée-
comme moi tendue, arc d’extase,
tu révèles soudain ta grâce
et tes mains soûles de rosée (…)

Tes yeux appris aux paysages
je les apprends en ce matin,
immuable à travers les âges
et sans doute à jamais atteint.
Déjà les mots faits de lumière
se préparent au fond de nous;
et je sépare tes genoux,
tremblant de tendresse première.

(…) Où finis-tu ? La terre oscille ;
et toi, dans le fracas de monts,
déjà tu renais des limons,
un serpent rouge à la cheville ;
femme, tout en essors et courbes
et tièdes aboutissements,
lumière, et nacre, ombres et tourbes
faites de quels enlisements?”

(…) Ton torse lentement se cambre
et ton destin s’est accompli.
Tu seras aux veilleuses d’ambre
de notre asile enseveli,
vivante après nos corps épars,
comme une présence enfermée,
quand nous aurons rendu nos parts
de brise, d’onde et de fumée”.

Extraits du poème Lespugue
L'oeuvre poétique
NRF Gallimard.

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